La mort de la maison individuelle déjà programmée?

02/12/2021

En langage philosophique, on appelle ça une aporie. C'est à dire une contradiction insurmontable, dixit Platon. Le sort de la maison individuelle plébiscitée par 75% des français est pourtant sur la sellette compte tenu des impératifs écologiques à venir. A savoir la loi climat sur la non-artificialisation des sols. la ministre du Logement Emmanuelle Wargon escompte une nouvelle « 'intensité heureuse » (hum...) en vouant aux gémonies la maison individuelle, vectrice de non-sens écologique, économique et social . 

Par Bertrand Dubourg, Rédacteur en chef de redactionfinanciere.com

L'impasse de la vie à la "Al Bundy"

Dans son discours lors de la convention « Habiter la ville de demain », du 14 octobre 2021, Emmanuelle Wargon explique que "l'aspiration à la propriété d'une maison individuelle reste grande, mais qu'il faut faire des choix sur la nature et la localisation de son logement ». Dès lors, le modèle de la maison avec jardin et la balançoire qui tangue avec la plancha qui fume n'est « plus soutenable » et mène fatalement à « une impasse ». Après un an et demi de confinement, il fallait oser. Tout le monde au bercail!

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Levée de boucliers. Par toutatix!

La réponse des professionnels immobiliers, avec leur casque de chantier encore vissés sur la tête, ne s'est pas fait attendre et a même déclenché l'ire de la Fédération française du bâtiment (FFB) qui a  « déploré la stigmatisation persistante de l'habitat individuel, à contresens des aspirations des Français ».

Le courroux de la Fédération des Constructeurs de Maisons Individuelles était lui aussi au beau fixe en arguant être « révoltée contre de tels propos tenus par une élite parisienne dite écologique et pourtant très loin des territoires, des habitants et de leurs préoccupations ». ET paf dans les dents.

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Nul n'est prophète dans son pays

Dixit le Figaro Immobilier, Emmanuelle Wargon vit toujours à Saint-Mandé, dans le Val-de-Marne (94). où les prix fleurent bons les 10.000 euros du m².  La ministre des futures banlieues heureuses ( on a vu le destin des barres construites dans les années 60...) y coule des jours heureux et possèderait même un un pavillon cossu de 150 m², estimée à 1,5 million d'euros.

Loi climat et artificialisation des sols

A la décharge de la ministre, la loi climat va dans le sens de cette petite histoire qu'on nous fredonne. En effet, elle promet « Moins de bétonisation des terres ». Le gouvernement souhaite in fine, diviser par deux, l'artificialisation des sols d'ici 2030. L'essor de l'habitat collectif est donc en marche, sans jeu de mots fallacieux. D'aucuns savent que l'artificialisation accélère l'extinction de la biodiversité et amplifie la dépendance à la voiture.

La loi Climat et Résilience, via 40 articles vise à la protection de la biodiversité. D'ores et déjà, l'Etat prévoit la mise sous cloche d'au moins 10 % de l'ensemble du territoire et des espaces maritimes sous juridiction française.

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Logiquement, la construction de nouveaux centres commerciaux hideux sera soumise à l'impérieuse nécessité de démontrer leur plus-value ( commerciale?) à moyen terme. On ne s'en plaindra pas. La loi dispose qu'aucune exception ne pourra être faite pour les surfaces de vente de plus de 10 000 m2. Alle Luia!

Concilier nécessité écologique et désir de maison individuelle

Le gouvernement parle de ville circulaire. Et non d'éternel retour Nietzschéen... tout en souhaitant remporter l'adhésion des français. Dans un pays aux 10 000 fromages dont se méfiait De Gaulle, le Sur-mesure devrait donc prévaloir. Ainsi, l'offre urbaine nouvelle, promettant des lendemains radieux, impliquera des prestations qualitatives et esthétiques, sous peine de créer des espaces déserts. Le cauchemar architectural urbain, créé dans les années 60, est encore dans toutes les têtes. Va falloir y aller sur les plans com' après les élections!

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Alors, comment concilier les désirs de maisons individuelles avec les impératifs écologiques et l'avènement d'une ville "densifiée"? La réponse sera apportée sans doute par la construction de logements spacieux, bien isolés et l'accès à pied à des services de proximité. L'accent devra être mis sur des espaces verts appelés ilots de ressourcement ( ça rappelle le jargon de l'ex- URSS)  où l'on pourra s'isoler grâce à une végétalisation idoine.

Dans cette nouvelle ville heureuse ( mais grave dense, comme aurait pu dire Céline dans Voyage au bout de la nuit), la ville devra comporter beaucoup d'arbres, voire même des forêts urbaines. Bref, du vert partout! On ne s'en plaindra pas.

Reste que n'est pas Le baron Haussmann qui veut. les transformations vertueuses à la sauce du 20 ème siècle ont lamentablement échoué en nous entrainant dans un traquenard sans fin. Espérons que les nouveaux architectes "made in XXIème siècle" nous apportent de nouveaux Frank lloyd wright, des descendants de Filippo Brunelleschi, des disciples de William Thornton plutôt que de nouveaux Le corbusier.